Premiers
kilomètres
De
longue date, nous avions prévu
de louer un Camper Van,
espèce hybride entre la voiture et le camping-car. Nous rêvions de
cette aventure, libres de nos déplacements, indépendants, à la
découverte d'une nature sauvage et préservée. Un Robinson en
roulotte en quelque sorte !
Le mythe en noir et blanc
L'agence
Jucy, par ses prix avantageux et ses couleurs criardes, a sans
hésitation retenu toute notre attention. De vert et violet fluo
revêtue, notre nouvelle compagne, symbolisée par une pin-up
affriolante, ne passe pas inaperçue, c'est le moins qu'on puisse
dire, et dès qu'elle croise l'une de ses camarades, c'est
immédiatement des concerts de klaxons et des feux d'artifices
d'appels de phare. Nous voilà pleinement intégrés à la solidarité
de la « Jucy
life » !
La réalité en vert et violet
La
prise en main du véhicule est délicate, la conduite à gauche étant
de rigueur. Aymeric, après quelques hésitations et contre-sens,
finira par trouver rapidement ses repères. Sabine s'essayera bien
quelques minutes au volant, mais abandonnera très vite l'idée de
s'engager sur les tortillards sinueux à la néo-zélandaise.
Sur la route
Nous
partons, enthousiastes, pour ces dix-sept jours de road-trip,
répartis en neuf
jours de location et huit jours de « relocation »,
un système intéressant où l'on peut ramener le véhicule en
échange de la gratuité de la location ; mais ce sera sans
compter le nombre de kilomètres à parcourir en un temps record.
Sans vraiment l'anticiper, nous allons parcourir plus de 5 500
kilomètres. A vos compteurs !
Direction le Paradis, sans retour
Cuisine à la bourrasque
Le
véhicule se compose à l'arrière de deux banquettes coulissantes
permettant de constituer un lit plutôt douillet, en rapport aux
matelas de sol de la tente. Une petite cuisine trône en lieu et
place du coffre à l'arrière, permettant de préparer nos repas en
plein air.
Une cuisine bien aérée
Le
seul hic, c'est que nous sommes en plein cœur de l'hiver austral,
petits êtres perdus entre les quarantièmes rugissants et les
cinquantièmes hurlants. Face à l'assaut des vents furieux de
l’antarctique, notre seule source de chaleur, une petite flammèche
de gaz, chancelle. Aymeric s'escrime, contre vents et marées, à
faire bouillir de l'eau tandis que Sabine maintient des torchons pour
parer aux bourrasques.
Va ta faire cuire un oeuf !
Un
bon matin brumeux, grêleux et venteux, Aymeric a frôlé la mort de
froid, au cours de sa lutte acharnée pour faire cuire des œufs au
bacon. Il déclarera forfait tandis que Sabine se retrouvera dans la
voiture, la poêle entre les mains, avec deux œufs crus flottants,
dans l'attente d'un temps plus clément. Vous l'aurez compris, nos
repas (à la chandelle tout de même) sont frugaux. Nous avons même
fini par considérer le thon en boîte comme un met d'exception !
Diner à la chandelle
Nuits
sauvages
Les
nuits sont aussi froides qu'isolées. Au cours de notre périple,
nous faisons la découverte des campings du DOC, le Department of
Conservation, véritable
institution qui gère avec un sérieux irréprochable le patrimoine
naturel néo-zélandais.
Les emplacements qu'il offre sont certes sommaires, munis
essentiellement de toilettes sèches, mais réellement situés au
bout du monde. Rien de mieux pour se retrouver encerclés d'une
nature sauvage avec les étoiles pour seule compagnie. Parfois, des
wallabies, les yeux écarquillés à notre arrivée, nous laissent le
champ libre après quelques bonds hésitants.
C'est ça un campement du DOC
Les camping sont
souvent difficiles d'accès, mais nous apprendrons à nos frais qu'il
est parfois encore plus difficile d'en repartir. Un soir, nous étions
lancés, téméraires, sur la piste d'un camping isolé, uniquement
accessible par une piste en gravier, au bord du lac Wanaka. Le temps
est exécrable, le brouillard impénétrable et la pluie diluvienne.
Nous débarquons sur un terrain désert, comme toujours, et nous nous
carapatons rapidement dans nos duvets. Sabine a le sommeil
tumultueux, cauchemardant d'un ranger muni d'un fusil venu de sa
forêt obscure nous déloger.
Premier matin
A l'aube, nous nous
réveillons, sains et saufs, sans le moindre ranger en vue, avant de
nous apercevoir qu'il est impossible d'ouvrir le campervan. Le
système automatique des portières est inefficace : les porte
sont tout simplement bloquées par le gel. Nous voilà prisonniers de
notre véhicule, sans une âme qui vive à l'horizon ! Il nous
faudra attendre patiemment le soleil, heureusement radieux ce jour
là, pour qu'il nous délivre de ses rayons bienfaiteurs.
Deuxième matin
Outre
les campings du DOC, nous avons aussi testé la place de parking, en
pleine capitale, aussi modeste soit-elle. Ne sachant pas si le
campement « à la sauvage » était autorisé, nous avons
dormi que d'un œil et d'une oreille, sous le couloir aérien,
ballottés par des vents furieux de l'océan, avant de lever le camp
à l'aube, sans pouvoir saluer Jérémy et Tui encore endormis, en ce
dimanche matin. Circonstance atténuante : le ferry, en grand
retard, nous avait déposé dans le port après deux heures du
matin !
Troisième matin
Douche ou bain ?
Le
réservoir d'eau étant réduit, nous nous employons à économiser
chaque goutte d'eau. En l'absence de douche, nous prendrons donc...
des bains.
Calme, luxe et volupté
Effectivement,
pour éviter que les cheveux de Sabine ne se transforme en dread
locks indémêlables, nous profitons des nombreux bains thermaux dont
regorge la Nouvelle-Zélande grâce à son intense activité
volcanique : bains en prairies (Hanmer Spring), bains en forêts
de fougères (glacier Franz Joseph), bains en bord de lac (Rotorua)
et notre préféré, le bain face aux montagnes enneigées (lac
Tekapo).
Bain scandinave
On
use et abuse de ces moments d'une divine douceur, tout à fait
comparables aux bains de Budapest !
Bain, lac et montagnes
Vannés du van ...
Il
faut bien vous avouer qu'après plus de cinq mille cinq cents
kilomètres parcourus (conduite à gauche), plus de quinze nuits
dans des conditions rustiques, vingt millions de moutons croisés,
et si peu de néo-zéandais, nous n'étions plus très loin de la
crise de nerf aux derniers jours de notre virée en solitaire.
Des zig-zags...
Aymeric
fut pris de soudains tirages de langue incontrôlés (façon Louis
de Funès) et Sabine envisageait, en co-pilote avisée, des trajets
de plus en plus fantaisistes (« Cela te dit un camping à
moins de 265 kilomètres ?» alors qu'il fait déjà nuit
noire).
Des moutons...
On
a frôlé la folie, mais, heureusement, la beauté époustouflante
des paysages était plus qu'au rendez-vous !
Et des boîtes aux lettres
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